Les faces cachées du Marais

Au début du XIVᵉ siècle, la monarchie gère la France en cohabitation avec l'église catholique, qui imprime sa lourde influence sur des territoires gérés par des archevêques. À cette époque, le Pape est représenté à Paris par Guillaume de Melun, puissant archevêque de Sens et conseiller personnel des rois de France. Le jeune Charles V n'aime pas trop séjourner au Louvre, qui n'est à cette époque qu'un étroit et sinistre donjon. Il décide donc de se faire construire un nouvelle grande résidence royale, et acquiert en 1366 en ensemble d'habitations dans le quartier du Marais, qui comprend l'hôtel particulier de l'archevêque de Sens.

Une centaine d'années plus tard, le bâtiment revient au culte, qui décide d'y reloger le nouvel archevêque Sens, Tristan de Salazar. L'ecclésiastique s'affaire alors à transformer sa demeure en luxueux châtelet dans le style gothique flamboyant. Les magnifiques échauguettes (petits donjons), les voûtes de pierre, les escaliers et les fenêtres sont façonnés et décorés avec une grande finesse par les maçons, de sorte à ce que l'hôtel ressemble plus à un petit château qu'à une demeure religieuse, rappelant au passage la toute puissance du Vatican.

Marguerite de Valois, dont le mariage avec Henri IV est déclaré nul en 1599 par l'Église, y réside quelques mois. Celle que l'on surnomme désormais "La Reine Margot" profite des entrées discrètes pour dévoiler ses charmes à un éphèbe de 18 ans. Malheureusement l'amourette est de courte durée puisque l'amant est assassiné juste devant l'édifice par son prédécesseur, lui aussi un autre jeune bellâtre âgé d'à peine 20 ans !
 

Une autre histoire relate que la monarque aurait fait couper un magnifique figuier planté juste devant la porte de l'hôtel, car il gênait les allées et venues de son carrosse. Cet incident aurait fortement choqué les riverains, peu admiratifs de la capricieuse Dame Margot, qui auraient ainsi décidé de renommer la venelle longeant l'édifice "la rue du figuier".
 

Après la révolution de 1789, l'Hôtel est vandalisé puis vendu comme bien national et abîmé par ses propriétaires successifs qui vont jusqu'à l'aménager en entrepôt de verrerie, en fabrique de conserves et même en confiturerie ! Il faut attendre la fin du XIXᵉ siècle pour que la Ville de Paris reprenne la gestion du monument et le transforme  pour accueillir les conseil des prud'hommes.

Aujourd'hui magnifiquement restauré, l'Hôtel de Sens est l'un des plus beaux témoignages de la splendeur du Paris médiéval. Il abrite dorénavant la bibliothèque Forney, consacrée principalement à l'univers des arts décoratifs, aux Beaux Arts, à la mode et au design.

Cachée au coeur du Marais depuis 1612, la Place des Vosges est connue pour être un haut lieu de résidence de personnalités du monde politique ou médiatique. Après la place Dauphine, elle aussi la plus ancienne place de Paris, et fut nommée comme beaucoup d'autres places de la capitale "Place Royale".

Après la Révolution française, les pouvoirs en place la rebaptisèrent « place des Fédérés », puis « place du Parc-d'Artillerie » (car on y fabriquait et stockait des armes), et « place de l'Indivisibilité ». Ce n'est qu'en 1800 qu'elle obtint son nom actuel, qui ne sonne ni "révolutionnaire" ni "républicain". Mais alors, d'où provient cette référence aux Vosges ?

En fait, l'appellation lui fut attribuée par le premier consul de Napoléon afin d'honorer le département des Vosges, qui non seulement fut le premier à envoyer des contingents de soldats volontaires pour consolider l'armée mais fut aussi le premier à s'acquitter de tous ces impôts: chapeau les Lorrains !

Parmi les plus remarquables caves de Paris, figurent sans conteste celles de la rue François Miron. Construite en 1248, la maison de ville de l'abbaye d'Ourscamp (dite aussi maison de l'Ours), servit de site parisien à l'ordre cistercien de Noyon au XIIIe siècle. Elle possède un imposant cellier gothique, long de 16m sur 12m de large, qui se décompose en trois superbes nefs reposant sur des gros piliers ronds.

Les moines entreposaient ici les produits issus de leur abbaye qu'ils écoulaient ensuite sur les marchés de la capitale, notamment rue Saint-Antoine. Ce n'est pas un hasard si l'association pour la sauvegarde et la mise en valeur du Paris historique a établi son siège ici, au coeur du Marais !

Quelques numéros plus loin, sous l'hôtel de Beauvais, on peut admirer une autre cave gothique, jadis aux mains de l'abbaye cistercienne de Chaalis (située dans l'Oise), qui avait aussi fait du lieu sa maison de ville à Paris.